04.2019
“Hors-Norme”
Exposition de Pape Diop au Pavillon de l’Institut Français de Dakar avec Yataal Art. Commissaire associé de l’exposition, scénographie, graphisme.
L’exposition « Hors Norme » présente les œuvres de l’artiste d’Art Brut Pape Diop. Son travail, qu’il expose lui-même dans les rues de la Médina, est collectionné et conservé par ceux qui le suivent.
Porté par cette volonté d’accessibilité et d’élargissement des champs artistiques de Yataal Art, les œuvres de Pape Diop sont ici présentées au Pavillon de l’Institut français, lieu d’art institutionnel. De la rue à la galerie, d’un espace ouvert à une pièce close, les œuvres changent de décor, sans pour autant ne rien perdre de leur caractère brut. Singulière, étonnante, riche et foisonnante, « Hors Norme » est une immersion dans un univers artistique unique et absolu.
« Art Brut »
Pléonasme conceptualisé par Jean Dubuffet en 1945.
S’intéressant à « l’art des fous », Jean Dubuffet décèle les principes propres aux créations artistiques produites par des marginaux, des singuliers, des personnes « hors- normes ». Il désoriente les théories artistiques pour se concentrer sur l’essence même du processus créatif permanent chez les artistes d’art brut, portés par un besoin intrinsèque et insatiable de créer : leur vie est dédiée à l’art, et leur production est proli que.
Les artistes bruts créent par nécessité, leur vision est absolue. Les artistes « normaux » sont dépendants des galeries, du public, des critiques, et leur vision est soumise aux in uences socio-culturelles de leur environnement. À partir de 1964, Dubuffet remplace le terme de folie par celui d’aliénation dans ses monographies théorisant l’Art Brut.
Les « aliénés créateurs » proposent un nouveau système de compréhension du monde, qui cherche à remplacer l’usuel et à bousculer l’ordre établi pour laisser place à un art fondamental, intemporel et universel.
Jeune homme, Pape Diop part sillonner les routes d’Europe sa guitare à la main. Dans les années 2000, il est rapatrié à Dakar, déclaré « fou ». Il retrouve son quartier d’enfance, la Médina, où il travaille sans repos, usant tous les matériaux et supports environnants pour servir son inspiration continue. Pape Diop, artiste brut, créé avec une entière liberté, faisant des principes académiques et des diktats imposés par la société : il est hors des normes.
Chez lui, la création précède la réflexion. Il fait corps avec son art, et son âme s’y consacre entièrement : Pape Diop dédie sa vie à la mise au service de l’expression artistique. Son besoin irrépressible de dessiner détient une portée divine, mystique, fatale. L’acte de création est au cœur de ses préoccupations, tant et si bien qu’il est possédé par l’obsession de production. Il voit autre chose, éclairé par une vision qui doit servir son propre destin.
Ainsi, Pape Diop a créé son propre univers, qu’il nourrit constamment de personnages, de gures religieuses de symboles, de néologismes signi cateurs. Il évolue dans un monde artistique qu’il maîtrise, qu’il entretient et qu’il renouvelle dans une logique poétique intime et conductrice, à portée hautement spirituelle.
Sur les sols, les murs, les morceaux de bois laissés à terre par les menuisiers de Médina, il peint. Son matériel : des mégots de cigarettes, une tasse de café, un morceau de cuir, une chaussure abandonnée. Pape Diop sollicite et utilise de manière optimale tous les éléments de son environnement immédiat, recyclant chacun d’eux, les détournant de leur raison d’être initiale pour leur conférer un usage artistique inédit.
Omniprésents, les dessins de Pape Diop ornent chaque ruelle de Médina, et l’artiste lui-même se plaît à exposer ses œuvres sur les comptoirs des boutiques, dans les arbres et les ateliers. Ces œuvres disséminées, réalisées dans une obsession créatrice, en ont causé une autre. Celle du collectionneur, du documentariste, du pionnier qui a observé jusqu’à adorer le travail de Pape Diop.
Modboye (Mamadou Boye Diallo), lui aussi natif de Médina, suit son étrange voisin depuis plusieurs années. Ils se sont apprivoisés. Ils ont noué une relation, insolite. Chaque jour, ils parlent, ils mangent, ils rient. Pape Diop peint, Modboye collectionne. Pape Diop performe, Modboye lme, enregistre, archive soigneusement, intrigué, fasciné, à son tour obsédé par l’acte de création frénétique de l’artiste.
Cette exposition présente le résultat de plusieurs années d’un travail conjoint. Si l’artiste brut ne cherche pas la gloire, les œuvres de Pape Diop sont destinées à être exposées. Elles trouvent ici leur place dans un contexte différent, institutionnalisé, qui soulève une problématique ambivalente et non-résolue : exposer Pape Diop dans une galerie brise-t-il la dichotomie de l’Art Brut définit en opposition à l’art culturel ?
Le peintre continuera à créer, à sortir ce besoin d’expression farouche, à vivre pour son art. Le collectif Yataal Art le protège, le préserve, le partage ; et grâce à une foi absolue, l’expose.
Une infime partie des œuvres de Pape Diop est ici présentée. La représentation ne peut tenir du réel. Pape Diop et Yataal Art ouvrent les portes d’un imaginaire concret, bouillant, et captivant.
“Hors-Norme”
Exposition de Pape Diop au Pavillon de l’Institut Français de Dakar avec Yataal Art. Commissaire associé de l’exposition, scénographie, graphisme.
L’exposition « Hors Norme » présente les œuvres de l’artiste d’Art Brut Pape Diop. Son travail, qu’il expose lui-même dans les rues de la Médina, est collectionné et conservé par ceux qui le suivent.
Porté par cette volonté d’accessibilité et d’élargissement des champs artistiques de Yataal Art, les œuvres de Pape Diop sont ici présentées au Pavillon de l’Institut français, lieu d’art institutionnel. De la rue à la galerie, d’un espace ouvert à une pièce close, les œuvres changent de décor, sans pour autant ne rien perdre de leur caractère brut. Singulière, étonnante, riche et foisonnante, « Hors Norme » est une immersion dans un univers artistique unique et absolu.
« Art Brut »
Pléonasme conceptualisé par Jean Dubuffet en 1945.
S’intéressant à « l’art des fous », Jean Dubuffet décèle les principes propres aux créations artistiques produites par des marginaux, des singuliers, des personnes « hors- normes ». Il désoriente les théories artistiques pour se concentrer sur l’essence même du processus créatif permanent chez les artistes d’art brut, portés par un besoin intrinsèque et insatiable de créer : leur vie est dédiée à l’art, et leur production est proli que.
Les artistes bruts créent par nécessité, leur vision est absolue. Les artistes « normaux » sont dépendants des galeries, du public, des critiques, et leur vision est soumise aux in uences socio-culturelles de leur environnement. À partir de 1964, Dubuffet remplace le terme de folie par celui d’aliénation dans ses monographies théorisant l’Art Brut.
Les « aliénés créateurs » proposent un nouveau système de compréhension du monde, qui cherche à remplacer l’usuel et à bousculer l’ordre établi pour laisser place à un art fondamental, intemporel et universel.
Jeune homme, Pape Diop part sillonner les routes d’Europe sa guitare à la main. Dans les années 2000, il est rapatrié à Dakar, déclaré « fou ». Il retrouve son quartier d’enfance, la Médina, où il travaille sans repos, usant tous les matériaux et supports environnants pour servir son inspiration continue. Pape Diop, artiste brut, créé avec une entière liberté, faisant des principes académiques et des diktats imposés par la société : il est hors des normes.
Chez lui, la création précède la réflexion. Il fait corps avec son art, et son âme s’y consacre entièrement : Pape Diop dédie sa vie à la mise au service de l’expression artistique. Son besoin irrépressible de dessiner détient une portée divine, mystique, fatale. L’acte de création est au cœur de ses préoccupations, tant et si bien qu’il est possédé par l’obsession de production. Il voit autre chose, éclairé par une vision qui doit servir son propre destin.
Ainsi, Pape Diop a créé son propre univers, qu’il nourrit constamment de personnages, de gures religieuses de symboles, de néologismes signi cateurs. Il évolue dans un monde artistique qu’il maîtrise, qu’il entretient et qu’il renouvelle dans une logique poétique intime et conductrice, à portée hautement spirituelle.
Sur les sols, les murs, les morceaux de bois laissés à terre par les menuisiers de Médina, il peint. Son matériel : des mégots de cigarettes, une tasse de café, un morceau de cuir, une chaussure abandonnée. Pape Diop sollicite et utilise de manière optimale tous les éléments de son environnement immédiat, recyclant chacun d’eux, les détournant de leur raison d’être initiale pour leur conférer un usage artistique inédit.
Omniprésents, les dessins de Pape Diop ornent chaque ruelle de Médina, et l’artiste lui-même se plaît à exposer ses œuvres sur les comptoirs des boutiques, dans les arbres et les ateliers. Ces œuvres disséminées, réalisées dans une obsession créatrice, en ont causé une autre. Celle du collectionneur, du documentariste, du pionnier qui a observé jusqu’à adorer le travail de Pape Diop.
Modboye (Mamadou Boye Diallo), lui aussi natif de Médina, suit son étrange voisin depuis plusieurs années. Ils se sont apprivoisés. Ils ont noué une relation, insolite. Chaque jour, ils parlent, ils mangent, ils rient. Pape Diop peint, Modboye collectionne. Pape Diop performe, Modboye lme, enregistre, archive soigneusement, intrigué, fasciné, à son tour obsédé par l’acte de création frénétique de l’artiste.
Cette exposition présente le résultat de plusieurs années d’un travail conjoint. Si l’artiste brut ne cherche pas la gloire, les œuvres de Pape Diop sont destinées à être exposées. Elles trouvent ici leur place dans un contexte différent, institutionnalisé, qui soulève une problématique ambivalente et non-résolue : exposer Pape Diop dans une galerie brise-t-il la dichotomie de l’Art Brut définit en opposition à l’art culturel ?
Le peintre continuera à créer, à sortir ce besoin d’expression farouche, à vivre pour son art. Le collectif Yataal Art le protège, le préserve, le partage ; et grâce à une foi absolue, l’expose.
Une infime partie des œuvres de Pape Diop est ici présentée. La représentation ne peut tenir du réel. Pape Diop et Yataal Art ouvrent les portes d’un imaginaire concret, bouillant, et captivant.